Jamais, sans doute, en France le terme "politique" n'a autant été galvaudé. On serait mal à propos, par les temps qui courent, de deviner la politique que nous prépare cette droite irrémédiablement éclatée sur l'autel des querelles de personnes.
Bien malin, de même, serait celui qui, dans les tergiversations de la gauche molle au pouvoir, pourrait dire où nous mène la politique, si c'en est une, de Hollande, Ayrault et consorts.
Non, en vérité je vous le dis, les Français n'ont, depuis toujours et pour longtemps, qu'une seule politique chevillée au corps: celle de l'autruche, qui consiste à s'enfouir la tête dans le sable pour dénier ce qui dérange ou heurte les sensibilités.
De fait, la franchouillardise conduit bien souvent à des aberrations. Le premier événement qui me revient en mémoire est le tollé qu'a rencontré la loi autorisant l'avortement en France. On a entendu tout et n'importe quoi: la loi Veil allait transformer la France en un gigantesque lupanar, elle était une incitation à la débauche...
Rares, dans les arguments des opposants à cette loi, se sont posés le problème des grossesses issues de viol ou d'inceste. Encore plus absents ont été ceux qui ont convenu du bout de lèvres qu'une IVG pratiquée en milieu hospitalier était mille fois plus souhaitable que le recours aux "faiseuses d'anges", qui ont conduit à la mort des milliers de jeunes femmes. Sans compter qu'il vaut parfois mieux se débarasser d'un embryon ou d'un foetus à naître plutôt que de lui pourrir la vie, quand ce n'est pas l'enfermer dans un congélateur...
Politique de l'autruche, vous dis-je: si on interdit l'avortement, le problème ne se posera plus. Et quand j'entends certains extrémistes religieux proclamer que, même en cas de viol, un enfant est la volonté de Dieu, je frémis.
Tout comme je frémis lorsque je me souviens du débat sur l'abolition de la peine de mort, après l'arrivée de la gauche au pouvoir en 1981. Les partisans de la peine capitale étaient, c'est vrai, majoritaires en France. Parce que (et on le constate chaque jour dans les tribunaux ou les cours d'assises) la volonté de vengeance l'emporte sur celle de justice.
Or la peine de mort, c'est quoi ? Un couperet qui tue en une fraction de seconde. Il est scientifiquement établi que le condamné ne souffre pas. Beaucoup moins en tout cas qu'il n'aurait souffert durant trente ans en milieu carcéral surtout lorsque l'on sait le sort réservé en prison aux assassins et violeurs d'enfants, les fameux "pointeurs". Pas besoin d'une grande démonstration pour prouver que les seuls à réellement souffrir (hormis les proches de la victime, cela va de soi) sont les amis et famille du condamné. Tolèreriez-vous d'être sanctionné pour un vol commis par votre cousin ?
Autre argument-choc invoqué par les partisans de la peine de mort: sa valeur dissuasive. Alors là, laissez-moi me gausser, et avec moi tous les experts, scientifiques magistrats, avocats ou journalistes qui se sont penchés sur la question.
Peut-on raisonnablement croire qu'un délinquant ou un criminel se pose la question de savoir ce qu'il encourt s'il passe à l'acte ? Non. Trois fois non. Pour une raison de la plus grande simplicité qui soit: Nul ne passe à l'acte s'il n'a pas la conviction de ne pas être pris.
Je terminerai sur ce châpitre de la peine de mort en vous rappelant au passage que la justice peut toujours admettre s'être trompée (soyez-en sûrs, des milliers d'innocents ont été exécutés pour rien au cours des derniers siècles). Alors je pose directement la question aux partisans de la guillotine (et ils sont hélas encore nombreux): Si Patrick Dills, Omar Rahdad ou Richard Roman avaient été exécutés, dans quelle position vous trouveriez-vous ? Sachez-le, on ne recolle pas un corps avec un rouleau de papier adhésif...
Politique de l'autruche encore "l'affaire" du mariage homosexuel. Franchement, je ne vois pas du tout ce qui peut géner dans le fait que deux personnes d'un même sexe s'aiment et aient envie de sceller leur union. Sortez la tête du sable et regardez autour de vous: l'homosexualité existe, elle a toujours existé. Et elle n'est pas, loin s'en faut, une déviance liée à notre époque. Lisez plutôt les textes relatifs aux moeurs dans l'antiquité grecque.
Et puis cessons de laisser entendre que la légalisation du mariage homosexuel attirera nos enfants vers cette "autre sexualité". Pour ma part, je suis hétérosexuel, seules les femmes m'ont toujours attiré. Et je vous assure que ce n'est pas un mariage "devenu attirant parce que légal" qui me fera changer mes habitudes. Même s'il y a une croisière à Mykonos à gagner. Ce n'est apparemment pas l'avis d'un député UMP (ouRUMP, je ne sais plus), qui prédisait il y a quelques jours "dans vingt ans, on sera tous homos! Et alors qu'est-ce-qu'il restera"
Allez, les autruches, vous pouvez à nouveau enfouir votre tête dans le sable. D'autant que je ne vais certainement pas tarder à vous sortir de votre obscurantisme pour vous parler de la légalisation du cannabis ou des salles de shoot.
Thierry Cayol